LOVE IS UNDERRATED (l’amour est sous-estimé)
On sous-estime l’amour. Moi le premier, je l’ai sous-estimé. Longtemps. L’amour…come on ! Un conte de fées, la force des faibles, une arnaque, une niaiserie, c’est ce que je croyais. L’amertume me privait de lui. De le toucher. D’être touché. Le partager. En entendant son nom, je pensais « toujours la même rengaine, aimer, aimer, aimer et pourquoi faire ? Aimer ou quoi ? » Aimer ou être en enfer.
Je ne savais pas aimer la douceur. Je ne savais pas aimer l’amour. Je ne savais pas m’aimer. Je voulais la force. Je voulais le pouvoir. Je vous avoir. Je voulais la sécurité. Je voulais recevoir. J’avais peur.
En fait, on ne m’a pas appris. Quand je dis on, je parle de la communauté humaine, celle qui m’a fait grandir, dans son ensemble. J’ai bien reçu l’amour de mes parents, ils ont fait de leur mieux, et je les remercie encore, mais il faut un village entier pour élever un enfant. Mon village ce fut ma ville, mon pays. Vous tous. On m’a appris à désirer la force, le triomphe, la distinction, la domination, la revanche, mais l’amour n’était pas mon ambition. J’ai réalisé récemment l’influence qu’a eu la culture hollywoodienne sur mes représentations de l’amour. J’ai réalisé à quel type d’amour on m’avait initié. Un amour fêlé.
La brèche des héros
À un moment donné, le héros dans le film finit toujours par baisser son bouclier, montrer sa brèche, à une blonde en général, en tout cas il nous laisse percevoir sa faille juste un instant, et d’ailleurs on nous dit qu’il est alors en danger. Mais ce n’est que pour justifier qu’il va zigouiller le méchant. L’amour pour justifier la violence en quelque sorte. Moi aussi sans m’en rendre compte j’ai laissé rimer amour et violence en moi. Banni la fragilité.
Jeune, apprenti-homme, mon héro intérieur était gladiateur, indestructible, paré d’une épaisse armure, possédant des super pouvoirs, justicier fier, sanglant et vengeur. J’allais prouver mon amour par la force. Je ne savais pas comment. Ni pourquoi. Pour pouvoir aimer il me fallait d’abord être fort. M’endurcir.
Mais la vie en a fait autrement de moi. En me polissant par les épreuves, elle m’a dépouillé de mon armure, couche après couche…Au lieu de m’endurcir, l’amour infatigable, lové au cœur de chacune de mes histoires, m’attendrissait…
Aimer les méchants ?
Ahhhh le méchant….mais qui est-il vraiment ? Plus j’avançais, plus je le voyais en moi, en chacun… Plus j’avance en moi, et plus je me vois en lui. Moi aussi je pourrais, moi aussi j’aurais pu mal tourner, façon Joker, si j’avais reçu le coup de trop. Plus je regarde en lui, et plus je ne vois que ça, L’amour…Les gentils et les méchants. Quelle connerie.J’ai entendu que le méchant est simplement entravé, dans sa méchanceté, et que quand l’amour finit par l’atteindre, le méchant se tait. Et son cœur de parler.
Hémorragie
Un jour, que quelqu’un patiemment cultivait à mon égard un amour doux et constant depuis un temps, sans se laisser décourager par quelque dureté rencontrée, sans s’effaroucher, un jour la goutte d’eau fit son ouvrage, à travers mes carapaces, elle ruissela jusqu’en lieu et place. Atteint le point d’hémorragie. En cet instant j’ai compris. Que l’amour est sous-estimé. J’ai senti la source couler.
La voûte de mes tréfonds s’entre-ouvrit le temps d’un instant. Ma caverne douloureuse, mon obscurité monstrueuse, tous mes bouts de cœur souillés, mes otages barricadés, cris étouffés, démons déchaînés, chairs boursoufflées, tout mon monde du deçà, mis à jour, touché… Le gardien orgueil est aux portes du cœur, veillant la blessure, il a accepté de baisser l’épée pour laisser passer.
Une lumière glorieuse, christique, m’inonde. Le souffle suspendu je sens la paix des mondes. Ma paix. L’amour. Partagé. Mouvement de vie.
Bientôt refermées, j’ai déposé un baume d’amour sur mes entrailles, et bien loin de moi alors la culpabilité, le dégoût, le rejet, dans un élan d’amour une armistice. J’ai aimé plus que jamais mes immondices. Mes monstres, des gardiens. Je leur dois la vie autant qu’aux anges. Ils nous sont aussi précieux que le sternum l‘est au péricarde. Et alors pensé à tous les monstres de ce monde…À l’amour qu’ils réclament.
Excalibur
Adulte j’ai toujours voulu me renforcer, me renforcer, me renforcer. Et toute cette force rassemblée m’a permis surtout une chose, tenir les murs du temple pour accéder à ma vulnérabilité. Je ne suis pas le héros que j’aurai voulu être. Je suis bien plus réel que cela. Je suis humain.
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Guillaume